Par Anne-Marie Casault
Est-ce réellement du jeu?
Nous en convenons de plus en plus, le jeu véritable est primordial pour le sain développement des enfants. Autant à la maison qu’en milieu de garde et même à l’école, le jeu devrait avoir une place importante dans le quotidien de nos enfants. Mais même lorsque nous sommes plein de bonnes intentions, savons-nous réellement le reconnaitre et le mettre en place?
Le terme « jouer » étant utilisé à de nombreuses fins, il devient parfois difficile de le définir de façon unanime. Est-ce que jouer aux blocs, jouer au soccer, jouer au Monopoly, jouer à la balle sont tous de réels jeux bénéfiques, de manière égale, pour la croissance de nos petits?
Après plusieurs années de recherches, 5 caractéristiques ont été proposées par les auteurs et spécialistes dans le domaine.
Premièrement, nous pouvons le remarquer facilement, le jeu est généralement accompagné de nombreux signes d’affects positifs. On peut penser aux sourires, aux rires et à l’expression d’enthousiasme. Généralement, les enfants éprouvent du plaisir à jouer. Ceci dit, ce critère n’est pas distinctif à lui seul parce que les enfants peuvent jouer et interpréter plusieurs situations tristes, épeurantes ou bouleversantes. De plus, ils peuvent éprouver du plaisir en faisant des tâches qui, elles, s’éloignent du jeu.
Deuxièmement, le jeu émerge de l’enfant, de son monde intérieur et de ses désirs. L’enfant décide de créer ou de participer à l’activité parce qu’elle est satisfaisante en soi. Il ne tente, à travers elle, de répondre à aucun besoin ou demande extérieure. Le choix de s’engager dans l’activité dépend à 100% de l’intérêt et de la décision de l’enfant.
Troisièmement, lors du jeu, nous misons toujours sur le processus (autant l’observateur et que le joueur lui-même). L’enfant joue et s’investit sans avoir un but précis. Il est intéressé, motivé et animé par l’action en cours, par le monde intérieur qui l’anime dans le moment présent.
Quatrièmement, les joueurs ont choisi l’activité et ils la dirigent, ce qui fait qu’il n’y a pas de consignes extérieures. Le jeu est donc empreint de liberté. Certains jeux peuvent contenir des règles, mais celles-ci doivent avoir été choisies par les joueurs et ainsi elles peuvent être modifiées pendant l’action également.
Finalement, le jeu est non littéral. Cela signifie qu’il n’est pas lié à la réalité. L’enfant peut interpréter ce qu’il veut, imaginer ce qu’il veut et, ainsi, est libre de conséquences (je meurs dans le jeu, je ne meurs pas pour vrai!). Cela permet également à l’imaginaire de prendre toute la place, chaque objet qui l’entoure peut en devenir un autre, selon le sens que l’enfant lui donne. De cette façon, l’enfant prendre une pause de la réalité, des situations qu’il vit actuellement. Cependant, cet accès sans conséquence peut lui permettre de toucher à des points sensibles, dans une zone où il se sent moins vulnérable.
En conclusion, bien que nos enfants aient du plaisir dans plusieurs contextes, pour vivre une réelle séquence de jeu, il faut bien plus que simplement du plaisir. Alors, si vous avez envie de laisser cette place importante au jeu pour son aspect essentiel et primordial dans le sain développement des enfants, assurez-vous d’avoir en tête ces 5 aspects.
Petit contre-exemple
Une éducatrice créant un contexte motivant où les enfants doivent chacun créer une marionnette afin de participer à la pièce de théâtre serait, certes, en train de faire vivre un moment agréable aux enfants. La plupart d’entre eux, peut-être tous, le feront dans le plaisir. Ce serait une activité pertinente et stimulant plusieurs aspects du développement. Cependant, ce n’est pas un contexte de jeu véritable puisque les consignes et attentes viennent de l’extérieur, en plus d’être dans un but précis à atteindre. C’est une belle activité, mais ce n’est pas du jeu. Le comprendre plus clairement peut faire prendre conscience que le jeu est peut-être moins présent qu’on le pense dans le quotidien structuré que vivent la plupart des enfants.